La métaphore : technique de coach
Qu’elle soit d’ordre explicative ou descriptive, isomorphique, provocatrice ou encore Miltonienne, la métaphore est toujours aidante. La bienveillance du coach consiste à déceler le moment opportun pour l’offrir à son sujet et à choisir la forme la plus adaptée aux processus mentaux de ce dernier. Qu’elle soit longue ou courte, complexe ou d’une simplicité déconcertante, directe ou sinueuse, la métaphore reste toujours impliquante pour le coaché qui peut s’en saisir et se l’approprier.
Technique « envoûtante », elle possède son secret, une alchimie si particulière qu’elle doit demeurer un mystère.
Aussi, je vous propose de contacter, par le biais de la métaphore qui suit, l’aide à la prise de conscience que l’on peut apporter à un sujet grâce à cette technique.
A la fois délicate et puissante, elle est un véritable allié pour l’accompagnant. Outil bienveillant pour le coaché, elle est parfaitement adaptée aux métiers de la relation d’aide en ce sens qu’elle s’offre entièrement à lui sans jamais imposer « une » interprétation ; pour une même métaphore chaque sujet prendra ce qu’il veut et emportera avec lui : « son interprétation ».
La distance la plus courte entre deux points est la ligne droite.
Le chemin qui sépare l’état présent de l’état désiré est parfois un labyrinthe.
La géométrie est une science, l’accompagnement un art.
« Le Puzzle »
Lorsque je rencontre une personne pour la première fois dans ma pratique, j’ai souvent à l’esprit que cette personne est telle un puzzle, mais un puzzle qui serait incomplet.
Cette image est très vague, très générique, car en fait je ne sais jamais, à l’avance, combien de pièces il reste à poser aux bons endroits. Peut-être même que le puzzle n’est-il même pas commencé ; une boîte, rien qu’une boîte dont l’emballage serait encore intact, avec son sac de pièces toujours bien fermé, toutes en vrac, dans un désordre qui, suivant les personnes, sera un frein plus ou moins puissant pour la réalisation d’elles-mêmes.
Certaines fois, le puzzle est sur le point de se finir ; peut-être ne reste-t-il que quelques morceaux à repérer, afin de compléter la photo ou le tableau qu’il représentera plus tard.
A ce sujet on peut s’interroger sur le fait, qu’à ce moment là, il paraît (du moins vu de l’extérieur) plus aisé pour le joueur d’avancer dans sa progression finale, qu’au tout début de l’agencement des pièces.
Dans ces conditions, pourquoi notre coaché ne parvient-il plus à disposer les dernières pièces qui sont à sa disposition ? Que peut-il bien le bloquer pour apporter la touche finale à son ouvrage ?
D’autres personnes encore arrivent avec des pièces qui peuvent appartenir à un autre puzzle, un puzzle différent, ou à plusieurs puzzles même, des pièces qui ne font pas partie de son jeu, mais qui se trouvent dans le même sac : « son sac ».
Que viennent-elles donc y faire ?
Ce sont sûrement les pièces de puzzles que l’on a déjà réalisés, rangés à la hâte, sans faire très attention à replacer les bons éléments dans les bonnes boîtes. Il arrive que certaines de ces « intruses » ressemblent à s’y méprendre aux originales et que notre joueur veuille absolument leur trouver un emplacement « légitime », car après tout, se trouvant dans « son sac » avec les autres, il n’y a aucune raison pour qu’il doute du contenu !
Une méthode simple et sage, serait de compter le nombre de pièces restantes d’une part, de compter le nombre d’emplacements restants d’autre part et de constater une différence possible. On peut imaginer que ce travail serait fastidieux, voire impossible, une erreur pouvant être commise trop facilement, et la méthode jamais réellement efficace. Mais la vraie raison pour laquelle cette vérification n’aura pas lieu, ne résiderait-elle pas plutôt dans une certitude acquise par notre joueur du genre : « Si les pièces sont dans ce sac…c’est qu’elles font obligatoirement partie de mon jeu ! ».
A contrario, le manque d’une ou deux pièces est un facteur essentiel pour finir le puzzle ; cela paraît évident. Et pourtant, certains se convainquent facilement d’une erreur de fabrication, ou de la perte inexplicable d’un élément du jeu, et complète trop vite les espaces vides, qui sont autant de trous désagréables et tellement repérables. Notre joueur s’empressera de les masquer, réalisant lui-même quelque chose d’approchant, pour que l’ensemble paraisse idéal, satisfaisant et que cette œuvre puisse être partagée fièrement avec d’autres sans la moindre critique.
Mais que l’on ne s’y trompe pas : de loin l’« imposture » est jouable, mais le puzzle ne sera jamais dans sa version authentique. Ceci est regrettable et souvent générateur de frustration pour le joueur, qui aurait tant voulu poursuivre la réalisation, jusqu’au bout, sans malheureusement jamais pouvoir y parvenir.
Et pourtant, la pièce manquante se trouve parfois dans le revers de la boîte, coincée par le hasard des choses…mais bien présente, et peu sont ceux qui pensent à regarder à cet endroit saugrenu !
Que le sac soit encore plein, presque vide, que l’on doit y trouver trop ou trop peu de pièces, le puzzle de notre vie, à un instant donné, mérite notre attention. Il est notre image authentique, notre vrai « moi », celui ou celle que nous aurions dû être depuis toujours, mais que les circonstances de la vie ne nous ont jamais vraiment permis d’achever.
Observer avec bienveillance un joueur et son puzzle, c’est repérer les moments de découragements face à la tâche, autant ludique soit-elle, les moments d’abandon, de rejet, de refus de poursuivre pour un temps cet assemblage méticuleux et préférer penser qu’il n’est pas à la hauteur de son plaisir. N’avez-vous jamais entendu des personnes vous dire : « …de toutes façons…ça, ce n’est pas pour moi, c’est bien trop difficile…je n’ai pas le niveau… »
D’autres, à l’idée de finir, car il s’agit bien de cela, voire s’en débarrasser, forcent sur les pièces, abîmant les emboîtures qui ne résistent que faiblement. Certes, les éléments sont posés, mais pas dans le bon sens ou au bon endroit. Certains ne s’en apercevront pas mais d’autres trouveront que le tableau présente des anomalies, des incohérences qui seront autant de faux-semblants chez notre joueur, autant d’ambivalences et de mal-être difficilement dissimulables.
Commencer, continuer le puzzle de notre vie, parfois tricher, se méprendre, autant de situations passées, présentes ou futures qu’apporte le coaché à son accompagnant.
Avez-vous remarqué, qu’à deux, un puzzle avance nettement plus vite. Cela peut paraître d’une évidence universelle, mais je veux dire par là, qu’il avance plus de deux fois plus rapidement. Bien entendu le travail s’en trouve doublé par deux productions individuelles, mais l’échange des informations transmises d’un joueur à un autre et la synergie qui en découle permettent également d’amplifier le talent de chacun, l’un devenant « ouvert » aux techniques de l’autre, ressentant intensément, comme par magie, le plaisir de voir son puzzle se construire à un rythme qu’il n’avait jusqu’à lors jamais atteint.
Ce second regard, celui que le coach pose sur le puzzle de la vie des personnes qu’il accompagne, peut trouver différente forme.
Le coach prend souvent la partie « en route » ; il va alors se placer dans l’environnement de son joueur, pas trop près afin de ne pas le déconcentrer, mais pas trop loin non plus pour pouvoir l’observer avec « soin », avec bienveillance et attention. L’observation du coach peut être globale ou détaillée repérant, au fil du temps, la stratégie du joueur, s’il trie les pièces suivant les formes ou bien les couleurs, formant à sa disposition autant de petits tas d’éléments présentant un caractère commun, s’il débute par les contours rectilignes du puzzle ou bien s’attaque-t-il à un espace quelconque de la représentation finale au hasard des emboîtures, s’il éprouve de la joie à ce qu’il réalise ou bien de la lassitude à s’attacher à son projet, s’il ressent parfois de la colère ou de l’agacement face à la difficulté qu’il rencontre ou bien encore fait-il preuve de calme et de maîtrise de soi.
Autant d’indices précieux à relever.
Mais qu’en faire ?
Les partager avec le joueur et lui recommander directement de changer telle ou telle pratique ?
Tentez la chose !
Essayez donc de vous immiscer dans la concentration d’une personne qui travaille depuis de longues heures, voire des journées entières à la reconstitution d’un puzzle qui peut apparaître très complexe. Vous remporterez un succès d’estime dont vous vous souviendrez longtemps. Effet assuré !
Et pourtant, qui n’a pas voulu conseiller un ami, un membre de sa famille, un collègue ? Cela débute souvent par cette phrase : « si j’étais à ta place… ».
Je suis certain que cette situation ne vous est pas inconnue. Cette démarche qui se veut aidante pour l’autre, a malheureusement, toutes les « chances » de ne pas aboutir, car chacun possède son propre puzzle et chacun tient, même à tort, à conserver sa propre méthode pour le terminer.
Non.
Les techniques à la disposition du coach sont nombreuses et assez diverses pour que chaque accompagnant trouve les siennes, c'est-à-dire celles qui lui conviennent le mieux, pour qu’ils puissent se les approprier et en faire ses propres techniques.
Personnellement, j’affectionne tout particulièrement la métaphore, vous l’aurez compris à la lecture de cet article.
La métaphore est redoutable et étonnante.
Je lui trouve d’une part, une force, une puissance, une efficacité pour amener le changement chez le coaché et paradoxalement d’autre part, une douceur progressive dans sans forme, dans son mode opératoire…quelque chose de magique.
« Enfoncez-vous doucement dans un bain d’eau chaude à température, ressentez la chaleur vous envahir et le bien-être s’installer en vous.
Vous êtes bien.
Vous ne bougez plus.
Vous vous détendez.
Rapidement vos pensées négatives s’éloignent de vous, la relaxation qu’apporte cette eau à votre corps, la sensation d’apesanteur relative favorisent le calme, la sérénité dont vous avez besoin… »
La métaphore dans sa forme est pareille à cette eau. Elle vous contacte doucement, délicatement, agréablement et finit par vous entourer complètement dans une bienveillance totale afin de vous préparer à recevoir un message. L’impact de ce message, qui reste unique pour chacun, dépendra de la préparation de ce bain : peut-être aura-t-on mélangé à l’eau une essence rare, un colorant, une huile particulière ou tout autre adjuvant contribuant à votre bien-être et à votre plaisir. Les odeurs, les couleurs, les densités ainsi obtenues généreront autant de sensations différentes pour chacun, mais aucun ne restera insensible à ce moment.
Le message d’une métaphore est, pour la personne qui la reçoit, le message qu’elle souhaite en faire, dès lors qu’elle est prête à le recevoir…